Du Jura à la Turquie : 8000 km en 19 jours

23 avril 2022 : je sors ma vieille R1150GS du garage pour un long périple, qui doit me mener jusqu’à Istanbul, en Turquie… soit environ 8000 km aller-retour !

Arrivé à Dole, pendant que mon compagnon de route envoyait ses derniers mails, je fixais l’attache du GPS au guidon de la GS. Car oui, au moment du départ à Lons, un boulon vicieux s’est fait la malle dans le carénage de ma VFR et je ne l’ai pas retrouvé ; il a donc fallu chercher, dans les pots à bricole de l’ami, un boulon qui ressemble, malgré le pas de vis anglais.

Le depart de Dole en direction de Lindau, à la frontière entre l’Allemagne et l’Autriche, a été donné à 11h30.

Pour gagner l’Allemagne le plus vite possible, il y a eu pas mal d’autoroute sur notre itinéraire, avec de la flotte en route avant Mulhouse. Mais le roulage une fois la frontière passée s’est fait au sec, ce qui était bien agréable…

J’ai pu pousser la R1150GS sur une partie d’Autobahn sans limitation de vitesse, mais cette grosse vache, bien chargée, n’a pas voulu dépasser le 180 km/h. Ce soir, étape au lac de Constance. Demain direction l’Autriche et les Alpes, mais ce qui est dommage est que les grands cols sont encore fermés.

Du Jura à la Turquie #2.

On approche déjà des 1000 bornes.

La journée de ce deuxième jour de road-trip entre le Jura et la Turquie a été longue, mais belle.

Parti dès 8 heures du lac de Constance, en Allemagne, nous avons vite rejoint l’Autriche pour une traversée du Tyrol et de ses belles routes de montagne sous un ciel alternant nuages et éclaircies.

Tant côté Allemand qu’Autrichien, les routes sont bien entretenues, avec des barrières de sécurité souvent doublées. La route d’Innsbruck était particulièrement fréquentée ce dimanche matin, mais à moto, on double assez facilement.

C’est en arrivant sur l’Italie et les Dolomites que nous avons reçu de légères averses, qui se sont transformées en neige au niveau des cols.

La SS508 est vraiment une route superbe qui nous a permis d’enchaîner les paysages hallucinants ; et même d’y faire une pause impromptue d’environ 1h30, un automobiliste s’étant mis en fâcheuse posture, dont la voiture barrait la route… On a eu le droit aux Carabineri, puis aux pompiers pour dégager l’auto…

La balade a alors pu reprendre, dans une atmosphère assez fraîche, le thermomètre de la GS de POL ayant affiché jusqu’à -2.

Autant dire que pour moi avec la 1150, les deux dernières heures ont été difficiles. J’ai alors ralenti le rythme dans la descente du dernier col…

Et comme on ne se sentait pas trop de passer la nuit sous la tente, nous avons dégoté un appartement BNB dans un joli petit village des Dolomites.

Du Jura à la Turquie #3

Aujourd’hui, l’étape s’est jouée des Dolomites à l’Adriatique avec une arrivée au sprint à Trieste, très jolie ville côtière où nous avons passé du bon temps…

C’est aussi à Trieste que José, le troisième larron du voyage arrivé de Savoie, nous a rejoints.

Ce matin, après une nuit très reposante, c’est vers 8h30 que nous avons pris la route, pour une matinée qui s’annonçait riche en sensations.

Quel bonheur en effet de rouler sur ces routes de montagne ensoleillées au matin, traversant pâtures et forêts d’où montent les fumerolles et qui donneront les nuages. Féerique !

Moins drôle pour moi a été l’approche du col Stella Ciampigotto avec une route bien enneigée qui ne m’inspirait vraiment pas confiance… et même quelques craintes.

Mais après reconnaissance du terrain, POL a estimé que « ça passait » à condition de :

1) dégonfler les pneus pour les mettre à 1.8 de pression

2) démarrer en 2e et y aller tranquillement

3) regarder loin devant.

Et c’est effectivement passé.

L’Expresso bu au refuge du col m’a permis de me remettre de mes émotions avant la descente sur une route en bien meilleure condition, mais des pneus sous-gonflés.

Les pleins d’air et d’essence refaits, les provisions du pique-nique achetées au village suivant (la Saint Marc est férié en Italie, jour de la fête de la Libération), on a pu repartir tranquillement vers notre destination, allant au plus vite, c’est-à-dire par une route droite, alternant les zones industrielles et commerciales, histoire ne n’arriver pas trop tard à destination…

La visite de Trieste vaut le coup, c’est une ville pleine de charme et vivante…

Voyage vers la Turquie #4

Imaginez une route côtière au bitume parfait, où les belles courbes se succèdent sur un plan qui paraît infini, le tout baigné par un doux soleil de printemps et surtout… pas un chat !

Lâchez sur cette route en avant-goût de paradis trois motards et vous aurez les ingrédients d’une matinée sympa…

On n’a pas traîné : après un départ à 7h30 de Trieste, on était à midi au port de Zadar, à écouter les étranges harmoniques des « orgues » marins de Nikola Bašić…

Après déjeuner, « pour avancer », la liaison vers Split s’est faite par une autoroute filant au travers d’un véritable désert de montagnes arides ; puis passé Split, nous avons retrouvé la très belle route côtière jusqu’aux portes de Dubrovnik, non sans un passage éclair en Bosnie-Herzégovine…

Pour parcourir les quelque 614 km de cette étape marathon, il aura fallu tenir le guidon (et le bitume) pendant 8h43 minutes…

Du Jura à la Turquie #5

Ce matin, notre groupe s’est séparé, mais se retrouvera à Istanbul. Au Km 1250, après un au-revoir autour d’un café à la station-service, je suis donc parti visiter Dubrovnik. Puis ai mis le cap sur Kukës ou j’ai réservé une chambre pour ce soir, au bord du lac.

Cette balade m’a encore fait franchir trois frontières (Bosnie-Herzégovine, Monténégro et Albanie), ou les contrôles ont été le plus souvent débonnaires à défaut d’être aimables. Méfiez-vous d’ailleurs des douaniers au premier abord sympathiques : ce sont souvent les plus casse-pieds !

Si la traversée de la Bosnie-Herzégovine a été rapide et assez facile, je garde un souvenir plus mitigé du Monténégro, avec des automobilistes le plus souvent pendus au téléphone qui se soucient pas des autres en général et des motards en particulier ; et des routes parfois en très mauvais état.

Comble de malchance qui aurait fait sourire mes camarades de virée : je me suis envoyé une 10e de kilomètres de route en construction, c’est-à-dire terre, ornières et cailloux. Autant dire que c’est passé stressé et tout doux, mais c’est passé !

Sinon, dans ce secteur des Balkans où c’est déjà l’été, on est sur des paysages de montagne, moins éblouissants que ceux de la Croatie, mais jolis quand même. D’ailleurs, les 150 km de virolos entre Shkodër et Kukès, je les ai appréciés, même si dans la descente vers Kukès, sur 60 bornes, de nombreux éboulements et affaissements de chaussée (non signalés) exigeaient une attention de chaque instant.

J’appréhendais un peu l’Albanie, car c’est un pays peu ouvert et plutôt arriéré. Mais les gens (du moins ceux que j’ai croisés) y sont gentils et serviables.

Quand j’ai pris un chemin de terre par erreur du GPS en ma défaveur et suis arrivé dans la cour d’une maison, le maître des lieux, me voyant dépité, m’a ouvert la route en voiture pour me remettre sur le bon chemin (toujours sans revêtement, mais beaucoup plus roulant celui-là). Arrivé au village en question, c’est un gamin en VTT qui m’a guidé jusqu’à la maison de mes hôtes.

Une maison traditionnelle et bien agencée au bord d’un joli lac ou l’accueil à été chaleureux et le repas (servi à la rupture du jeun) plantureux. Quant au petit déjeuner, ce matin, il était tel que j’ai pu sauter le déjeuner, ce midi…

Il y a un autre truc bizarre en Albanie, c’est leur passion pour les Mercedes. Ils en ont tous une. Mais des trucs hors d’âge, sans doute arrivés là après un échec au CT.

J’ai d’ailleurs vu rouler pas mal de trucs étranges en Albanie, qu’on ne saurait plus qualifier d’automobile, mais le plus bizarre a été cette paysanne à pied avec deux vaches sur l’autoroute

Du Jura à la Turquie #6

Quand même, c’est un peu casse-pieds ces histoires de frontière. Rien que pour mon étape du jour, entre Kukès (Albanie) et Plovdiv (Bulgarie), j’ai dû passer par le Monténégro, le Kosovo, la Macédoine, et la Bulgarie, soit sept contrôles d’identité en même pas 500 km. Jamais ma carte d’identité ne m’aura autant servie ! Zone Schengen, monnaie unique : on ne se doute pas de notre facilité de vivre avec l’Europe.

Dans les Balkans, c’est une autre paire de manches ! A chaque pays sa monnaie, pas celle des autres, et comme la plupart des paiements se font en cash, on passe sa vie à chercher un distributeur pour tirer une poignée de billets…

Sinon pas de photos aujourd’hui. Parce que la lumière n’était pas terrible, avec beaucoup de nuages, et que les paysages de l’Arménie, du Monténégro, du Kosovo et de la Bulgarie se ressemblent : de belles et hautes montagnes ; des villes et villages assez en désordre. Et sales. Sauf peut-être au Kosovo, qui semble finalement être un peu plus prospère que ses voisins, mais loin des standards de la Slovénie ou la Croatie…

A vrai dire, la route a été longue. Mitigée aussi : de jolis enchaînements de virages au Monténégro jusqu’à un col encore un peu enneigé au Kosovo ; puis une descente chaotique avant une longue et morne plaine très venteuse (à en faire chavirer la moto) ; la montagne est revenue en Macédoine, puis ce fut l’entrée dans une Bulgarie très surveillée, mais aux routes assez désastreuses… et bien sûr un peu de pluie sur les 20 derniers kilomètres alors que j’étais vanné. J’ai passé les 2500 km au compteur depuis le départ et la fatigue commence à se faire sentir.

Parti à 9h, mon GPS m’annonçait une arrivée à 18h, ce qui faisait quand même beaucoup. Mais j’ai pigé en passant la frontière de Bulgarie : on perd une heure et l’heure d’arrivée est donnée en heure locale.

Du Jura à la Turquie #7

Pour rejoindre Istanbul, je suis parti de Plovdiv vers 10 heures, non sans avoir pris le temps de me balader dans la vieille ville, qui vaut la visite.

Puis le paysage étant plutôt plat entre la Bulgarie et la Turquie, j’ai pris l’autoroute, gratuite pour les motos et limitée à 140. Il ne m’a fallu « que » 30 minutes pour passer le contrôle de sortie de Bulgarie puis les 5 contrôles de la douane Turc ; tout le monde ne pourra pas en dire autant… ma tête devait leur revenir ou ils avaient d’autres chats à fouetter…

Les autoroutes sont aussi gratuites pour les motards en Turquie, heureusement, car pour se procurer la vignette c’est toute une histoire (il faut aller dans un bureau de poste acheter une carte de passage dans les 7 jours qui suivent, sinon l’amende est salée) ; d’ailleurs, depuis la Croatie, je n’ai pas croisé beaucoup de motards… vu la façon de conduire locale, téléphone greffé à l’oreille et clignotant superflu, ils doivent avoir tous été tués dans d’effroyables accidents…

Bref, dès que l’on passe la Slovénie et la Croatie, on entre vraiment dans un autre monde ou, entre deux coups de klaxon, le « inch Allah ! » l’emporte sur toute autre considération.

Après 7 jours de route et plus de 3000 km parcourus, une douzaine de pays traversés depuis l’Allemagne (Autriche, Italie, Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Albanie, Monténégro, Kosovo, Macédoine, Bulgarie et enfin Turquie), notre trio de motards s’est reformé à Istanbul pour deux jours de repos mérités.

C’est vrai que le rythme de la semaine a été fort, avec des étapes entre 300 et 500 km sur des routes pleines de surprises et de dangers, sans oublier les formalités douanières…

Pour moi, les derniers kilomètres ont été éprouvants dans l’enfer de la circulation Stanbouliote et je me demande comment j’ai pu arriver entier à mon hôtel, situé dans la vieille ville près du Grand Bazar et de la mosquée Bleue, sans me faire renverser par une auto, un camion ou un bus, sans même glisser sur les pavés mal joints des rues en pente…

Mais sitôt la moto posée, les copains retrouvés, le charme de cette ville incroyable a de nouveau opéré : c’est la troisième fois que j’y viens et je ne m’en lasse pas.

Du Jura à la Turquie #10

Ce soir je suis arrivé en Grèce après une longue étape de liaison de plus de 630 km depuis Istanbul, sans grande difficulté mais m’ayant réservé son lot de surprises.

Le passage de la frontière a ainsi été long et laborieux : 1h45 parce qu’un douanier (ou l’ordinateur de façon aléatoire ?) a voulu passer ma moto au rayons X.

C’est au 3e checkpoint (donc après une bonne vingtaine de minutes de queue) que le gabelou de service m’a annoncé qu’il fallait aller au contrôle Rayons X. Mais pour y arriver, il me fallait faire demi-tour et me mettre dans la file des voitures revenant de Grèce. J’ai évidemment tenté de passer le point suivant (qui était la dernière barrière avant la Grèce), mais ça n’a pas marché… donc demi-tour.

J’ai heureusement eu l’idée de me rendre à pied au bureau de contrôle pour demander si, arrivant de Turquie, je pouvais remonter la file et aller directement à la cabane des Rayons X… autorisation accordée par un fonctionnaire un peu compréhensif.

Au bâtiment des rayons X, il n’y avait pas d’attente. Le préposé m’a demandé de placer ma moto puis de retirer mon sac de selle avant qu’il ne lance l’auscultation. Il a juste été intrigué par ma combinaison de pluie (veste et pantalon roulés en boudin) et par le carré formé par mon matelas pneumatique, autant de choses qui, à l’écran, lui ont paru suspectes… il n’en était rien.

Une fois le contrôle effectué, j’ai dû retourner dans la file des véhicules allant en Grèce qui s’était malheureusement allongée. Mais une nouvelle fois, à pied, je me suis rendu au 3e checkpoint pour valider mon passage au rayons X et demander la permission de remonter la file pour aller au checkpoint 4, d’où je suis sorti très rapidement alors que je m’attendais à un contrôle des bagages…

Autant dire que quand la barrière s’est levée, je n’ai pas demandé mon reste, me précipitant vers la Grèce, non sans adresser au passage un petit salut aux soldats Turcs puis Grecs, armés jusqu’aux dents, qui se font face dans le no men’s land constitué par la traversée d’un pont au bitume totalement déformé, mais qu’aucun des deux pays antagonistes ne semble vouloir refaire.

Arrivé aux portes de l’Europe, après avoir dû rouler dans une lotion désinfectante (ce qui est assez désobligeant pour les Turcs, quand même !), de battre mon cœur s’est de nouveau arrêté lorsque le douanier Grec préposé à la fouille des véhicules m’a fait sortir de la file des véhicules et m’a demandé mes papiers… aurais-je le droit à un 2e contrôle poussé ? Mais non… il a juste voulu me faire passer plus vite, le brave homme. Et d’ajouter en Français, dans un grand sourire, « c’est bon, allez-y monsieur, et bon voyage ! »

C’est quand même bien l’Europe : maintenant, je ne devrais plus subir de contrôle douanier jusque dans le Jura !

En Grèce, j’ai toutefois été rattrapé par la grisaille, mais par beau temps, la route côtière doit être superbe. Par contre, je suis un peu déçu par Théssalonique : j’imaginais une jolie station balnéaire, mais non : c’est une côte bien bétonnée avec une longue promenade et heureusement des cafés et restos sympas ; avec aussi un centre ancien assez compliqué à arpenter à moto (ce que j’ai fait) offrant des rues étroites en pavés à forte pente, avec des rigoles au milieu pour évacuer l’eau comme un rail, idéales pour se casser la gueule, ce qui a failli m’arriver ; l’ensemble paraît de surcroît assez miséreux. D’ailleurs la vie semble chère en Grèce, avec une essence à plus de 2€ le litre (sans chèque énergie de l’Etat ni rabais à la pompe) et des restos autour de 20€ pour un plat et une bière. On verra ce que donne Athènes, mais la crise financière a visiblement mis ce pays, et ses habitants, à genoux.

Demain, le soleil devrait revenir et je vais évoluer sur des routes de montagne.

Du Jura à la Turquie #11

J’ai passé cet après-midi les 4000 km au compteur depuis mon départ de Lons-le-Saunier. Et si la météo n’a pas entièrement tenu ses promesses, côté routes, j’ai été gâté entre Thélassélonique et Lamia, la capitale de la Phthiotide où je dors ce soir dans un appartement.

Lamia, c’est un peu la Grèce profonde, ce genre de lieux oubliés des touristes et des guides, mais qui permet de prendre réellement le pouls d’un pays.

Elle ressemble à pas mal des villes que j’ai traversées, avec notamment ses immeubles ni anciens, ni modernes, qui semblent avoir été dessinés dans les années 60 et 70 par le même architecte, mais implanté selon un schéma de ville ancienne…

Même si les paysages de montagne sont grandioses (lorsqu’ils ne sont pas dans les nuages, comme ce matin), on est loin, pour l’heure, de l’effet « wahooo ! » que procurent l’Italie ou la Croatie. Et la Grèce que je vois n’est pas celle que j’avais imaginée. Je compte donc sur Athènes, le berceau de notre civilisation où je serai dès demain midi, pour me rendre l’image de carte postale qui me manque !

Sinon sur les routes de montagne, on remarque de très nombreux « afiéroma » installés le plus souvent dans les virages ; ce sont autant d’oratoires érigés en souvenir de défunts. Ça fait d’autant plus frémir que j’ai bien failli l’avoir, moi aussi, ma petite chapelle sur le bord de la route, lorsque dans une descente, un automobiliste s’est brusquement deporté alors que j’arrivais. Son pare-chocs est passé à un cheveu de ma valise latérale, mais c’est passé ! Je crois que la conduite des automobilistes est pire encore en Grèce qu’en Albanie, car ici, ils roulent très vite et très mal ! Faut vraiment que j’apprenne quelques jurons en Grec !…

Du Jura à la Turquie #12

Me voilà désormais à Athènes.

C’est une nouvelle fois sous les nuages, mais au sec, que j’ai fait la route depuis Lamia. Parti tôt, j’ai bien cru que j’allais prendre la pluie dès la première montée, mais non : la route a été tranquille, plutôt déserte et bonne jusqu’aux portes d’Athènes où m’attendaient les éclaircies.

Par contre, dès que le soleil darde ses rayons, la température monte fort sur la cité. A tel point que cela m’a donné envie… de changer mes plans et de profiter de la journée ensoleillée qui s’annonce, jeudi sur l’ensemble de la Grèce, pour quitter la ville et aller voir ses fameux monastères perchés des Météores, cachés dans les nuages quand je suis passé à proximité, hier. Je serai bien resté un jour de plus à Athènes, mais tant pis ! Pour 600 km de balade (mais avec des routes bien viroleuses), cela ne se discute pas !

Plus encore qu’à Rome, à Athènes, on baigne dans l’antique. Et c’est assez chouette. Pour l’anecdote, je m’attendais à trouver près de ces sites, comme on peut en voir à Barcelone, des sculptures vivantes représentant des grands anciens Grecs et des figures de la mythologie, mais non : juste la faune habituelle des vendeurs de grigris, de gratouilleux de guitare et de mandants Roms comme on en croise dans tous les lieux touristiques…

Je suis aussi passé devant le Parlement au moment de la relève de la garde, avec une chorégraphie étonnante de la part de ces soldats, qui sont des appelés du contingent et n’ont le droit de bouger ni de parler durant leur période de faction. Heureusement, un soldat veille à leur bien-être, prêt à virer les touristes qui chercheraient à leur tirer les moustaches ou se faire un selfie avec ces hommes-automates. Faire partie des « Evzone » est sans doute très prestigieux, mais je ne les envie pas.

Du Jura à la Turquie #13

A priori, il fallait être un peu fou pour retraverser une bonne partie de la Grèce, s’enquiller plus de 600 km dont au moins 400 de routes de montagne, rester 9 heures en selle, juste pour aller voir un lieu que j’ai loupé mardi, à cause des nuages.

Il fallait être fou, mais il fallait le faire aujourd’hui ou jamais. Ou du moins peut-être jamais. Car Zeus ne m’a pas laissé le choix, m’ouvrant une petite fenêtre météo pour me permettre d’apercevoir une partie du Péloponnèse puis, après avoir traversé une plaine venteuse et des montagnes arides, le fameux et incroyable site des Météores où se trouvent, perchés, un réseau de vingt-quatre monastères construits entre les XIIe et XVIe siècles qui, jadis, étaient inaccessibles par la route (on y montait hommes et vivres par une sorte de téléphérique à bras).

Sachant que la journée serait belle, mais rude, ce matin, je me trouvais au petit déjeuner de l’hôtel, à Athènes, à 7 heures pétantes. Et à 7h30, en selle ! C’était parti pour un festival d’images et de décors incroyables. Un festival de virages aussi.

Sitôt sorti d’Athène, la route qui mène à Corinthe et Bari prend un tour sympathique, longeant la côte. Dans la lumière du matin, avec un reste de brume, c’était vraiment très beau.

On suit ce trait de côte tortueux jusqu’à passé Mesolongi, mais c’est à partir de Peta qu’on attaque vraiment la montagne, avec des passages parfois compliqués lorsque le bitume, réparé de bric et de broc, devient un conglomérat de terre et de cailloux plus ou moins tassé « en attendant ». Sauf que ces chantiers, souvent répétés, ne sont pas annoncés et tomber là-dessus en sortie de virage donne des sueurs froides aux motards, qui doivent y aller molo-molo.

La qualité du paysage, mais aussi la solitude que l’on ressent à évoluer dans ces hautes montagnes (sur 200 km, j’ai dû croiser 10 autos et camions) compensent largement la difficulté.

Arrivé à une 30e de km de mon objectif, la route s’est transformée en 4 voies de plaine, et il a fallu doubler des cars de touristes. Un temps j’ai eu peur que ce site des Météores, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, ne soit devenu une « fête à Neuneu ». Et de regretter par avance la solitude de la montagne… mais non ! Bien sûr c’est très visité, mais à l’heure de mon arrivée, les autocaristes étaient repartis. Restait la beauté poignante de ces pitons rocheux sculptés par le temps et l’érosion ou les hommes, pour se rapprocher d’un Dieu qu’ils ont inventé, ont implanté ces incroyables monastères.

Assurément, tout cela valait le voyage !

Du Jura à la Turquie #14

Après ma journée marathon d’hier, je n’avais que 350 km à parcourir aujourd’hui entre les Météores et Corinthe, alors autant dire que j’y suis allé à la cool. D’autant que le trajet m’a fait repasser par Lamia et m’a ramené jusque dans la banlieue d’Athènes, avant la bifurcation vers le Péloponnèse.

En quittant mon hôtel à 8 heures, j’ai pu profiter d’un dernier tour dès Météores sous le soleil et sans touristes. Il était hélas trop tôt pour visiter l’un des monastères, qui n’ouvrent aux visiteurs qu’à 10 heures avec l’arrivée des autocars d’Athènes. A 3€ par personne et par monastère, en plus des ventes des boutiques, les moines ont trouvé là un filon en or !

Lors d’une pause photo en montagne, j’aurai toutefois pu entendre le chant montant d’un pope célébrant le culte en son église… et dans le calme de la vallée, cela a été un beau moment. Il ne me manquait que l’odeur de l’encens.

A Corinthe, je voulais voir ce fameux canal, creusé à la fin du XIXe siècle (1881-1893) mais dont le projet remontait au règne de Néron, qui n’avait pu entreprendre les travaux faute de budget (déjà !)

Avec ses 24,60 m de large (pour 6,3 km de long), il est désormais trop étroit pour être emprunté par les navires modernes, mais le creuser a été une vraie prouesse. Malheureusement, coincé entre une quatre voies urbaines et une sortie d’autoroute, le site n’est pas vraiment mis en valeur.

Puis j’ai mis le cap sur l’ancienne Corinthe, située à une douzaine de kilomètres de la ville moderne (qui n’offre aucun intérêt à part un front de mer et des plages) pour voir quelques vestiges, notamment le temple d’Apollon et boire un coup face à la montagne où culmine l’acrorinthe qui a autrefois servi de centre religieux et à la défense de la cité durant l’Antiquité et le Moyen-Âge.

Demain s’achève mon périple en Grèce. Je dois remonter vers le Nord pour prendre le ferry à Igoumenitsa en direction de Bari, au sud de l’Italie. Mais j’ai le temps : le bateau ne lèvera l’ancre que vers minuit.

Du Jura à la Turquie #15 et 16

Quand on voyage à l’arrache et à moto (je suis sur un circuit totalement improvisé depuis mon départ d’Istanbul), il faut s’attendre à rencontrer quelques emmerdements. Et les prendre avec philosophie, comme un piment de l’existence.

Ainsi, à changer mes plans au dernier moment mercredi soir à Athènes, je me suis trompé de jour dans ma réservation de bateau et quand je suis arrivé à l’embarquement, mon bateau était parti depuis belle lurette. J’ai cependant trouvé à embarquer sur un autre ferry, plus tardif (avec un départ à 1h du mat), mais à destination de Brindisi, bien plus au sud que Bari. Par chance, il restait de la place et des cabines. J’ai donc pu passer une courte nuit tranquille, car le réveil a été sonné par l’équipage à 7h00, soit… 1h30 avant d’accoster !

J’étais le seul motard et le seul Français (je crois) à bord. Et un peu avant 9h, après m’être faufilé dans le flux des camions, j’étais sorti du port, direction les Abruzzes, soit 500 km à avaler.

Une partie du trajet sur la SS16 (une grande route sans intérêt) se déroulera sous une pluie battante ; un comble alors que les Pouilles sont plutôt sèches habituellement ! Mais le sourire et le soleil sont revenus vers Manfredonia, lorsque je me suis engagé sur la superbe SS89 vers Vieste, où la pause déjeuner, dans un très bon restaurant en bord de mer, m’a récompensé de mes émotions.

Restait ensuite à gagner Pescara, à environ 250 km de là, en partie par la route côtière. Et reprendre la flotte sur environ 80 km…

Il y a des jours, comme ça…

Du Jura à la Turquie #17

Et me voici en Toscane, dans cette Italie de rêve où le soleil tape déjà dur.

Les quelque 500 km entre Pescara et le Nord de Florence sont passés crème, même si la route côtière entre Pescara et Ancôme, très urbaine et encombrée, n’a pas été une partie de plaisir. Heureusement la suite a été plus intéressante, avec de la SS roulante et virolante comme on les aime.

Un arrêt visite à Sienne m’a permis de redécouvrir cette cité historique à côté de laquelle j’étais un peu passé lors d’un premier voyage au guidon de mon Aprilia Mana. Il faut dire qu’il y faisait alors très, très chaud…

J’ai laissé Florence, qui est certainement la plus jolie ville du Nord de l’Italie, mais que j’ai déjà visité de fond en comble, pour m’arrêter à la campagne : j’avais repéré pour ce soir une super chambre (et table) d’hôte dans une belle ferme toscane en pleine montagne. Sauf que je n’avais pas prévu que pour y arriver, il me faudrait prendre, sur 3 km, un chemin non goudronné, en descente et escarpé…

C’est passé et c’était beau. On verra demain matin s’il est plus facile de monter que de descendre. Il me semble que oui…

Du Jura à la Turquie #18

J’avoue, j’ai craqué. J’ai trahi. Et j’en ai même tiré un certain plaisir coupable… Alors qu’un nouveau bord de presque 500 km m’attendait ce jour, réalisé en 10h de guidon me promettait le GPS, j’en ai eu marre et entre Massa et Gênes, j’ai pris l’autostrade.

Autostrade qui, malgré un colossal bouchon d’une vingtaine de kilomètres difficile à remonter avec ma grosse Bertha (les voitures étaient arrêtées en pleine file et les gens étaient dehors à converser sur l’autoroute), ces 100 km m’ont fait gagné deux bonnes heures d’une route côtière que je connais, longue succession de villes, de zones commerciales, de campings et de parcs d’attraction passant par Pise et La Spezia qui n’offre aucun intérêt, et m’ont permis de découvrir Gênes, une ville (énorme) mais vivante et pleine de charme.

Une bonne plâtrée de pasta et un tour dans la vieille ville plus tard, requinqué, j’ai pu reprendre le guidon pour la grande banlieue de Turin, avant dernière étape de ce voyage. Il me restait alors 4h10 de route, dont une bonne partie en montagne et ce fut un régal…

Ce soir, au km 7642 de ce voyage, je suis un peu fourbu, mais au pied des Alpes. Demain, retour dans le Jura par le Mont-Cenis, puis Chambéry et Ambérieux, soit 428 km supplémentaires…

Ce matin, le parcours non revêtu entre le gîte et la route s’est plutôt bien passé : sur ces chemins, il est tout de même plus facile de monter que de descendre ! Les deux difficultés (des ornières en virage avec des pierres à franchir) l’ont été tranquillement, debout sur les cales-pieds. Ensuite, la route goudronnée, très étroite et sinueuse sur une quinzaine de kilomètres jusqu’à la vallée, n’a pas été simple non plus. Certaines épingles étaient si serrées qu’il aurait presque fallu faire tourner la moto sur la béquille pour s’en sortir…

Du Jura à la Turquie #19

Lons-le-Saunier, terminus !

Après presque 8100 km au compteur de la R1150GS, 14 pays traversés (Allemagne, Autriche, Italie, Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Albanie, Kosovo, Macédoine, Bulgarie, Turquie, Grèce et Italie de nouveau) et 19 jours de voyage, je suis rentré cet après-midi à bon port, non sans avoir fait quelques détours en Savoie, pour attraper les quelques cols ouverts situés à proximité de mon itinéraire.

Finalement, une improvisation au jour le jour m’a permis de découvrir une partie de la Grèce, où je n’avais jamais mis les pieds.

Ce qui m’a plu lors de ce périple, c’est qu’il a été en très grande partie réalisé sur des routes de montagne, or rien n’est plus ennuyeux pour un motard que la plaine et les lignes droites. Donc de ce côté là, j’ai été servi.

Mes étapes ont été en moyenne (sur 17 jours de roulage et 2 jours de repos à Istanbul) de 476 km / jour, ce qui est un peu trop, l’idéal étant, pour moi sur ce genre de routes, situé autour de 350 km/j.

J’ai été content de revoir Istanbul, même si je déconseille d’y circuler tant cela bouchonne. J’ai été étonné par l’Albanie, la Macédoine, la Bulgarie ; charmé par la Slovénie, la Croatie et le Kosovo qui, par rapport à ses voisins, semble mieux tirer son épingle du jeu.

Je suis plus partagé en ce qui concerne ce que j’ai vu de la Grèce. C’était la destination phare des vacances dans les années 80, mais pour ma part, j’ai trouvé un pays en miettes, à l’abandon, et des habitants qui parlent peu anglais, ce qui rend le contact difficile. Je comprends dès lors que le tourisme de masse se soit déporté vers la Croatie, qu’il faut absolument visiter hors saison : en été, ce doit être l’enfer !

Reste l’Italie, à nulle autre pareille. J’étais ce matin dans un village au pied des Alpes, sur la route de Briançon, à 40 km de Turin. Le genre assez pauvre, qui n’a rien pour faire rêver. Pourtant, au café, les gens étaient tous joyeux. Il y en avait même qui chantaient. C’est l’Italie. C’est comme la France, avec ce truc en plus : la joie de vivre, tout simplement…

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